L’espoir ancre dans la pierre

( Jean-Yves Estre – Le Dauphiné Libéré – 15 septembre 2005 )

05Au cours des fêtes célébrant les vingt ans d’existence de la Maison de la Culture Arménienne de Vienne, ce dimanche à partir de 17 heures, sera inaugurée une stèle, oeuvre du sculpteur Artouche Mkrtchian.
Haute de 2,60 mètres sur 1,20 de large, cette sculpture en pierre reconstituée et pesant près d’une tonne a été mise en place mardi, rue du Cirque, à l’entrée de la MCA. Elle est chargée de symboles, dans la lignée de tout ce qu’a réalisé cet artiste depuis une vingtaine d’années tant à Erevan qu’à Lyon, où il a installé son atelier voici cinq ans.
Mkrtchian a souhaité, explique-t-il, faire figurer côte à côte, dans un style très lisible, différentes représentations de l’identité arméniennes. La nation est représentée par la religion (une église traditionnelle devant le mont Ararat), la force et le courage (le héros Katch Vartan portant une épée) et la langue, ciment de la civilisation : Mesrob Machtots déroule l’alphabet qu’il a inventé il y a tout juste seize siècles, en l’an 405. L’artiste, qui aime les animaux (en Arménie, il a été éleveur d’oiseaux…), a entouré une famille d’un bestiaire symbolique : deux phénix couronnés (survivance et renaissance de la culture arménienne) et deux lions protecteurs encadrant la roue de l’éternité.
De cette pierre colorée se dégage une sérénité qui fera un contre-point avec l’admirable mais atroce évocation du sculpteur Toros, au Grand-Estressin, rappelant la barbarie du génocide de 1915.
Cette stèle, qui est à l’évidence un témoignage d’amour assez nostalgique pour la mère patrie, se lit également comme un acte d’espérance dans l’avenir de ce peuple qui a surmonté tant d’épreuves.

Vingt ans : une leçon

( H.L. – Le Dauphiné Libéré – 19 septembre 2005 )

Hier était fêté le 20e anniversaire de la MCA. Une cérémonie qui, au-delà du protocole, a démontré l’intégration parfaite de la communauté arménienne à Vienne.
Cette fête démontrait aussi l’importance grandissante au fil des ans de l’Arménie pour la France et inversement. D’abord et avant tout un message tout simplement humain. Une bonne heure de discours avec pas moins de 6 interventions hier à la MCA en fin d’après-midi. Dans la petite coure de la Maison de la Culture on a oublié le temps très frisquet tant on a été touché par la chaleur des propos.
Se sont successivement exprimés Patrick Tchoboian directeur de la MCA, Gérald Eudeline vice-président du conseil général, François Rochebloine président du groupe d’amitié France-Arménie à l’assemblée nationale, Artouche Mkrtchian, auteur de la stèle en place devant la MCA pour ses 20 ans, Jacques Remiller, et Edouard Nalbandian ambassadeur d’Arménie en France. Ce, en présence de près de 200 personnes dont Thierry Kovacs conseiller régional et Patrick Curtaud conseiller général.
Vocation de la MCA : rassembler et transmettre. Rassembler la communauté arménienne et transmettre l’Arménie avec son fardeau du génocide de 1915 notamment. 20 ans qui ont vu ce génocide enfin reconnu, qui ont vu le naissance de l’Arménie en tant que république indépendante, une république fragile qui compte toujours sur la diaspora arménienne pour l’aider. 20 ans qui nous mènent en 2006-2007, à l’année de l’Arménie en France.
Pendant 20 ans, la communauté arménienne a vécu une parfaite intégration à Vienne. Pendant 20 ans, cette communauté a aussi été reconnue comme une des composantes de la vie viennoise à part entière. Par sa participation tant à la vie économique que culturelle. Au point qu’aujourd’hui, avec la stèle qu’elle vient de poser, elle apporte un nouvel élément patrimonial à notre cité.
Pendant 20 ans, la communauté arménienne a eu aussi cet incroyable mérite : celui de faire l’unanimité au sein de la classe politique. Les maires de la ville ont changé, les présidents du conseil général se sont succédés. Mais tous ont eu à coeur de travailler avec cette maison de la culture. Tous ont souhaité aider cette communauté si proche de nous. C’était le vrai message d’hier : montrer qu’un peuple, qui accepte de s’intégrer à la vie d’un pays tout en pouvant comme maintenant se tourner vers sa république, mobilise une vrai solidarité autour de lui. Nul ne peut nier l’existence et la souffrance d’un peuple.
Les relations entre Vienne et Goris, entre l’Arménie et la France sont là pour le montrer. A tel point que c’est grâce à l’exemple de la communauté arménienne qu’hier François Rochebloine a demandé à cette dernière de l’aider à faire condamner les négationnismes de tous les génocides dans le monde.
La MCA a aujourd’hui 20 ans et elle nous montre un chemin millénaire : celui du nécessaire rapprochement des peuples de tout temps.